Afrique : résoudre le casse-tête des morsures de serpents venimeux

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Le continent africain regorge de plusieurs espèces de serpents venimeux. Chaque année, leurs nombreuses morsures font des dégâts tant au niveau des humains que des animaux, notamment domestiques. Pour en venir à bout des dommages causés par les morsures de ces reptiles, l’Afrique a un grand besoin d’anti-venins efficaces. Mais leur prix, ainsi que leurs quantités et qualités, causent du souci aux populations et autres spécialistes. Explications.

L’OMS (Organisation mondiale de la santé) tente de résoudre le problème. L’entité onusienne vient de rendre publique sa feuille de route globale. Concrètement, elle s’intéresse à la formation des personnels de santé et met l’accent sur une sensibilisation tous azimuts des populations dites à risque, celles-là mêmes qui sont directement exposées aux morsures des reptiles. Mais le volet qui tient le plus à cœur à l’OMS est la fabrication d’anti-venins. Cette dernière option est considérée comme étant la plus importante de toutes.

Le procédé, découvert au 19e siècle, n’a pas connu d‘évolution significative depuis maintenant 50 années. Du venin de serpent est extrait et injecté progressivement à un animal de la taille d’un cheval (par exemple) sur une durée de plus d’un an.


Les gouvernements et organisations internationales doivent vraiment prendre ce problème à bras-le-corps, tout simplement parce que c'est la bonne chose à faire.
Au fil du temps, le ‘‘cobaye’‘ développe des anticorps, qui sont recueillis dans son sang puis purifiés. Une fois cette étape passée, l’anti-venin est conservé dans une ampoule de verre. Il est ainsi prêt à être utilisé, notamment en intraveineuse.

Le continent africain s’est brusquement retrouvé face au dilemme de la disponibilité du remède, lorsque le laboratoire français Sanofi a stoppé en 2014 la production de son anti-venin polyvalent dénommé “FAV-Afrique”. La raison de cet arrêt ? Le manque de rentabilité, selon le laboratoire. Le stock de cet anti-venin sur le continent s’est épuisé en 2016.

La nature ayant horreur du vide, des spécialistes Africains, mais aussi Indiens, se sont lancés dans la course à la fabrication d’anti-venin, avec plus ou moins de succès. Et cela ne se fait malheureusement pas sans les contrefacteurs, qui ne voient que le gain financier au grand dam des populations dans le grand besoin.

A ce propos, Global Snakebite Intiative, une ONG australienne spécialisée dans le contexte des morsures de serpents, fustige “l’introduction opportuniste de contrefaçons de mauvaise qualité ou d’antivenins inappropriés”, conduisant très souvent à “des effets désastreux”, et des prix en hausse dans le but de palier la baisse des ventes.

Le tri des produits et le dilemme de leur disponibilité

Quant à l’ONG Médecins sans frontières (MSF), elle va un peu plus loin, faisant le tri des anti-venins à conseiller et à déconseiller dans les centres de soin. Julien Potet, en charge des maladies tropicales négligées au sein de MSF :

“Nous évaluons les anti-venins existants, qui pour la plupart ont été mis sur les marchés sans aucune donnée clinique, sans aucune donnée d’efficacité ou d’innocuité chez l’homme.”

Mais il n’y a pas que la qualité des anti-venins qui cause problème. Leur disponibilité fait souvent défaut en Afrique, surtout depuis le retrait de Sanofi. Selon une étude menée en 2018 par l‘École de médecine tropicale de Liverpool, un anti-venin polyvalent sud-africain de très grande qualité s’est avéré quasi-introuvable hors de l’Afrique australe.

Julien Potet se prononce sur cette problématique :

“Le marché reste volatil. Ce sont de petits producteurs et le marché des anti-venins africains est assez limité. En général, ils (les fabricants) attendent d’avoir une commande de plusieurs personnes en même temps, qui justifie le lancement d’une production (…) Il faut donc vraiment anticiper la demande.”

Royjan Taylor est le directeur du laboratoire Bio-Ken à Watamu, sur la côte kényane. Sa spécialité ? Collecter et vendre du venin de serpent, qui permet la fabrication d’anti-venin. “Nous n’avons pas assez d’anti-venins à l’heure actuelle. Nous perdons chaque année 1.000 personnes au Kenya à cause des morsures de serpents”, déplore-t-il.

Les experts de la production et de la vente d’anti-venin ont en ce moment les oreilles tendues vers l’OMS, dont la conclusion des travaux est attendue pour dans quelques mois. L’organisation onusienne a lancé une étude d’envergure sur les anti-venins disponibles en Afrique, afin d‘évaluer leur efficacité et leur éventuelle toxicité pour les utilisateurs.

Redonner vie au marché des anti-venins en Afrique

La disponibilité des anti-venins occupe une place de choix dans les ambitions de l’OMS, qui compte remettre sur pied le marché. Dans son viseur, elle compte rendre disponibles 500.000 traitements anti-venimeux chaque année d’ici 2024 en Afrique sub-saharienne. Ensuite, l’Organisation mondiale de la santé compte passer à la vitesse supérieure, avec 3 millions de traitements dans le monde ,,,,,

 

 

 

( ENGLISH )

 

 

 

The African continent is full of several species of poisonous snakes. Each year, their many bites are doing damage to humans and animals, especially domestic animals. To overcome the damage caused by the bites of these reptiles, Africa has a great need for effective antivenoms. But their price, as well as their quantity and quality, cause concern to the population and other specialists. Explanations.

WHO (World Health Organization) is trying to solve the problem. The UN entity has just released its global roadmap. Specifically, it focuses on the training of health personnel and focuses on all-round awareness of populations said to be at risk, those who are directly exposed to the bites of reptiles. But the most important aspect of WHO is the manufacture of antivenoms. This latter option is considered to be the most important of all.

The process, discovered in the 19th century, has not changed significantly for 50 years now. Snake venom is extracted and injected gradually to an animal the size of a horse (for example) over a period of more than one year.


Governments and international organizations must really tackle this problem, simply because it is the right thing to do.
Over time, the "guinea pig" develops antibodies, which are collected in his blood and purified. Once this step is over, the anti-venom is kept in a glass ampoule. It is thus ready to be used, in particular in intravenous.

The African continent suddenly found itself faced with the dilemma of the availability of the remedy, when the French laboratory Sanofi stopped in 2014 the production of its polyvalent anti-venom called "FAV-Africa". The reason for this stop? The lack of profitability, according to the laboratory. The stock of this anti-venom on the continent ran out in 2016.

As nature hates the void, African and Indian specialists have started the process of making anti-venom, with varying degrees of success. And this is unfortunately not without the counterfeiters, who see only the financial gain to the chagrin of populations in dire need.

In this regard, Global Snakebite Intiative, an Australian NGO specializing in the context of snake bites, castigates "the opportunistic introduction of poor quality counterfeits or inappropriate antivenoms", very often leading to "disastrous effects", and rising prices in order to offset the decline in sales.

Product sorting and the dilemma of their availability

As for the NGO Doctors Without Borders (MSF), it goes a little further, sorting out anti-venom to advise and advise against in care centers. Julien Potet, in charge of neglected tropical diseases at MSF:

"We are evaluating the existing anti-venoms, which for the most part have been put on the market without any clinical data, without any efficacy or safety data in humans."

But it is not only the quality of the anti-venoms that causes problem. Their availability is often lacking in Africa, especially since the withdrawal of Sanofi. According to a study conducted in 2018 by the School of Tropical Medicine in Liverpool, a high-quality South African polyvalent antivenom has proved almost impossible to find outside southern Africa.

Julien Potet speaks about this problem:

"The market remains volatile. They are small producers and the African anti-venom market is quite limited. In general, they (the manufacturers) expect to have an order from several people at the same time, which justifies the launch of a production (...) So we must really anticipate the demand.

Royjan Taylor is the director of the Bio-Ken Lab in Watamu, on the Kenyan coast. His speciality ? Collect and sell snake venom, which allows the manufacture of anti-venom. "We do not have enough anti-venom right now. We lose 1,000 people each year in Kenya because of snake bites, "he said.

Experts in the production and sale of anti-venom are currently listening to the WHO, whose conclusion is expected in a few months. The UN organization has launched a major study on anti-venoms available in Africa to evaluate their efficacy and possible toxicity to users.

Reviving the anti-venom market in Africa

The availability of anti-venoms occupies a prominent place in the ambitions of WHO, which intends to re-establish the market. In her viewfinder, she plans to make available 500,000 anti-venom drugs each year by 2024 in sub-Saharan Africa. Next, the World Health Organization plans to move up a gear, with 3 million treatments worldwide.

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